Bounia Yahaya, Directeur général de la Protection des Végétaux : «En ce début de campagne, la DGPV dispose d’environ 157.000 litres de pesticides dont 22 000 litres déjà positionnés au niveau des régions, soit une couverture de 157.000 hectares»
Monsieur le Directeur général, la campagne agricole 2020 s’annonce avec des quantités de pluies enregistrées dans certaines zones de notre pays. Quelles sont les dispositions prises par votre Direction pour faire face aux ennemis des cultures qui peuvent tenter de réduire à néant les efforts des paysans ?
Je vous remercie pour l’occasion que vous me donnez de faire le point sur les préparatifs de la campagne d’hivernage 2020, notamment en ce qui concerne la protection et la défense des cultures. Mais avant de répondre à votre question, permettez-moi de rappeler pour la circonstance, les missions de la Direction Générale de la Protection des Végétaux(DGPV) et ses méthodes d’intervention. La DGPV est responsable de la conception et la mise en œuvre de la politique nationale de protection des végétaux. A ce titre, elle est entre autres chargée d’assurer la protection phytosanitaire sur l’ensemble du territoire ; de contribuer à la déclinaison, à la mise en œuvre et au suivi évaluation de l’Initiative 3N « les Nigériens nourrissent les Nigériens » ; de participer à l’élaboration en relation avec les Directions, les Institutions spécialisées concernées des lois et textes réglementaires en matière de lutte phytosanitaire ; d’établir, en rapport avec la Direction Générale des Ressources, le projet de budget de sa Direction et des Directions nationales correspondantes et assurer le suivi de l’emploi des différents crédits ainsi que la gestion du
personnel et du matériel sous sa responsabilité; d’assurer la programmation et le suivi régulier des campagnes phytosanitaires en rapport avec les Directions concernées ; d’élaborer, en relation avec les structures nationales, régionales et internationales concernées, les stratégies de promotion de lutte alternative et procéder à leur diffusion au niveau des producteurs ; d’assurer la tutelle ou la correspondance des projets, des organismes régionaux et internationaux dont la Direction Générale a la charge ; et de superviser et coordonner les activités des Directions placées sous sa responsabilité.
La DGPV développe ses activités selon trois (3) stratégies qui sont, la lutte chimique basée sur l’utilisation des pesticides (produits chimiques) ; la lutte biologique axée sur l’utilisation des bio pesticides ainsi que l’élevage et la production des ennemis naturels des déprédateurs (ravageurs) ; et enfin la lutte alternative qui elle valorise les traitements à base des produits locaux. Il est de coutume dans notre pays, qu’en pareille circonstance, le Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage à travers la Direction Générale de la Protection des Végétaux, s’active pour prendre toutes les mesures qui sont de nature à créer les conditions requises pour un bon déroulement de la campagne. Les dispositions que nous avons prises sont de trois (3) ordres, à savoir, l’acquisition et la mise en place au niveau des régions, des produits phytosanitaires (pesticides), des appareils de traitement et des équipements de protection individuelle (EPI).
En ce début de campagne, la DGPV dispose d’environ 157.000 litres de pesticides dont 22 000 litres déjà positionnés au niveau des régions, soit une couverture de 157.000 hectares.
Concernant la formation/recyclage des Agents d’encadrement et des Brigadiers phytosanitaires, la DGPV dispose d’un réseau de plus de 3.000 Brigadiers phytosanitaires formés et équipés d’appareils et EPI. Ces Brigadiers sont des producteurs et productrices vivant dans leurs terroirs et donc issus de toutes les communes en particulier celles à vocation agricole. Ce réseau de Brigadiers est suivi et encadré par le dispositif d’encadrement du Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage à tous les niveaux (commune, département, région et niveau central) ; enfin, la remise en état de notre logistique terrestre et aérienne. La DGPV dispose de 8 véhicules 4×4 de traitement dont 5 sont au niveau des régions. Quant à la Base Aérienne, nous disposons de trois (3) avions de traitement dont deux en panne et un à l’état neuf.
Du point de vue organisationnel comment la Direction Générale de la Protection des Végétaux procède-t-elle pour un bon maillage du territoire national ?
Pour mener à bien sa mission la DGPV est organisée en quatre (4) Directions centrales chargées entre autres de concevoir et superviser les interventions phytosanitaires sur l’étendue du territoire national ; huit (8) Services régionaux (SRPV) qui sont chargés de la mie en œuvre de la politique de protection des végétaux à l’échelle régionale ; des Services Départementaux (APV) qui sont chargés de l’exécution des interventions phytosanitaires au moyen des appareils autoportés et un réseau de Brigadiers Phytosanitaires pour des traitements localisés. Nous nous appuyons sur le dispositif d’encadrement de base de notre Ministère de tutelle à savoir les Chefs de Districts Agricoles (CDA) pour assurer l’organisation, le suivi et l’évaluation des traitements phytosanitaires effectués.
Monsieur le Directeur Général, est-ce que votre structure dispose de moyens humains et matériels suffisants pour faire face aux ennemis des cultures ?
Non malheureusement, nous ne disposons pas de moyens humains et matériels suffisants eu égard à la gigantesque mission assignée à la DGPV. En termes de moyens humains, nos besoins sont de dix-neuf (19) cadres au niveau central ; cinquante-trois (53) cadres au niveau régional, départemental et des postes de contrôle phytosanitaire. Il est aussi impératif d’envisager la mise en formation de trois (3) voire quatre (4) jeunes Nigériens pour la spécialisation en pilotage agricole et la formation de quatre autres pour la maintenance des avions. En termes de moyens matériels, la DGPV a besoin de réparer les deux (2) avions en panne, acquérir un deuxième aéronef à l’état neuf, douze (12) véhicules 4×4 dont dix (10) de traitement et deux stations wagons pour les missions de coordination et supervision des activités, dix (10) appareils de traitement autoportés de type AU8115, des GPS pour le géo référencement des zones d’infestations et des traitements et d’au moins deux cent mille (200 000) litres de pesticides pour renforcer la capacité d’intervention de nos services.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans l’accomplissement de votre mission ?
Comme je l’évoquais tantôt, nos difficultés actuelles s’appellent l’insuffisance de produits de traitement ; l’insuffisance de moyens logistiques, notamment les véhicules de traitement et les appareils autoportés ; l’insuffisance d’aéronef pour les traitements aériens; le manque de pilote ; l’insuffisance de personnel surtout au niveau opérationnel, sur le terrain. Sur tout un autre plan, permettez-moi d’évoquer les dispositions prises dans le cadre de la lutte biologique pour dire que la DGPV est en train d’exécuter un programme d’élevage en masse au laboratoire d’Habrobracon hebetor qui est un parasitoïde, ennemi naturel à la Chenille mineuse de l’épi sur le mil. A cet effet il est prévu 31 500 sacs de lâchers qui seront placés au niveau de 2100 villages à semis précoces pour une couverture de 6.000 000 ha de mil à protéger. Ce programme est d’une importance capitale quand on sait que les pertes de récoltes causées par les dégâts de la Chenille mineuse de l’épi sur le mil peuvent atteindre 100%.
En guise de conclusion, permettez-moi de rassurer nos vaillants producteurs et productrices, et leur dire que malgré toutes les difficultés que je viens d’évoquer, la DGPV reste et demeure confiante et sereine, quant à l’accomplissement de sa mission, car tous nos besoins sont connus des autorités du Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage qui sont à pieds d’œuvre pour trouver des solutions idoines. Qu’Allah le Miséricordieux, le Très Haut, gratifie notre pays d’un hivernage fécond. Amen.